
27 Oct La Chine est-elle une superpuissance technologique?
Oublié son statut d’atelier du monde, la Chine veut faire de son innovation une référence pour le monde. Pour passer du « fabriqué » à « Inventé en Chine ». Le décryptage de l’entrepreneur Denis Jacquet.
La pandémie de Covid, suivie à la corde par l’Ukraine, a alimenté et alimente à la fois une actualité à l’odeur de « sapin » – rien à voir avec Noël –, et une terreur qui commence à congeler par le bas nos économies qui n’en avaient pas vraiment besoin. À cela s’est greffée l’élection présidentielle qui fait qu’on a négligé les vrais sujets et particulièrement du seul ressort qui permettrait de conserver notre rang encore quelque temps dans une Europe en déclin. À savoir l’innovation, les secteurs d’avenir, la technologie et le terreau qui lui permettrait de fleurir en France et en Europe.
Alors allons nous promener, non pas outre-Atlantique mais pour une fois, en Chine. Celle qui continue son parcours en tête, malgré une flambée épidémique, la pire depuis deux ans, et une politique Covid qui paraît extrême aux Occidentaux. À raison, mais en partie seulement.
Le gouvernement chinois pratique une stratégie Covid zéro avec, il est vrai, peu de subtilité. Comme toujours. En Chine, le collectif l’emporte toujours sur l’individuel. Mao avait donné un malheureux exemple avec l’envoi des intellos aux champs dont la conséquence avait été une famine et un nombre de décès record. Le Grand Timonier disait alors que « si c’est le prix à payer pour que le reste de la population vive, alors qu’il en soit ainsi ». Autre lieu, autre culture.
Dominer par la technologie
Seulement, la Chine, elle, a une stratégie. La domination par la technologie au profit du régime politique. L’Etat a lancé un nouveau plan quinquennal jusqu’alors exécuté à la perfection. Un plan massif qui passe par les territoires moyens: faire des régions de taille moyenne, les nouveaux leviers de l’enrichissement de la Chine. Tout le contraire des politiques européenne et américaine qui misent tout sur les mégalopoles.
L’Empire du Milieu, au lieu de faire fi de ses territoires, a donc décidé de les enrichir et de les faire croître. Il est impensable que le virus qui se répand à vitesse Grand V dans les villes à forte concentration mette des grains de riz dans l’engrenage de la réussite des régions.
C’est l’avantage du calcul à long terme sur le petit calcul à court terme. La Chine veut profiter du bazar mondial pour prendre un temps d’avance sur tout le monde, y compris les États-Unis.
Pendant que l’Ukraine et les élections désormais législatives obsèdent la France, la Chine tente de tordre le cou à la Covid, uniquement pour ne pas risquer de perdre cette course de vitesse.
Si en Europe et aux États-Unis, nous ne pensons plus innovation, croissance et avenir, la Chine, elle, en a l’obsession. La boussole, l’imprimerie, le papier… L’innovation a toujours été dans son ADN. Le calcul d’un point de vue stratégique est comme toujours éclairé et brillant.
Investissements colossaux
Des régions désertées par une industrie bas de gamme dont la Chine s’éloigne chaque jour font l’objet d’investissements colossaux afin d’assurer leur transformation. Zhuzhou – dans la province méridionale du Hunan – en est un exemple. Mais il y a en a tant d’autres.
Ancien temple d’industries « sales » et polluantes, elle se dirige vers une nouvelle vie digitale. Et c’est partout pareil. Cela explique en partie la politique terriblement répressive que mène le président Xi Jinping dans les grandes villes, voulant éviter que les seniors ne meurent comme ce fut le cas à Hong Kong avec Omicron. Mais le plus impressionnant, c’est que pendant ce temps, la Chine garde le cap sur l’avenir, ne cédant rien aux pressions de ceux qui ne s’attardent que sur le court terme. La Chine c’est le temps long. Le temps court, n’est qu’une perturbation anecdotique, laissée à l’Occident.